Notre colosse national se la joue virtuelS’il y a bien un sport populaire et à la fois méconnu, c’est le judo. Evidemment, la sortie d’une simulation dédiée à cet art martial ne peut que s’accompagner d’un engouement de la part des pratiquants et des férus de ce sport. Mais ce sont également beaucoup de questions qui se posent dans la tête des spécialistes du jeu vidéo : comment adapter ce sport, où l’objectif n’est pas de mettre KO son adversaire mais plutôt de l’éliminer grâce à un lot de techniques implacables, à travers un jeu vidéo ? C’est le défi que s’est lancé le studio 10Tacle, un studio belge qui a développé le jeu pour le compte de BigBen Interactive, qui fait ici ses premiers pas dans l’édition de jeux majeurs. Et qui de mieux pour parrainer ce jeu que notre demi-dieu à nous français, j’ai nommé David Douillet ? Je vous le demande ! Hajime ! Penchons-nous tout d’abord sur le point le plus important du jeu : son gameplay ! Car si celui-ci avait été un jeu de combat basique, l’enchaînement de mandales n’aurait pas été trop compliqué à gérer. Comme tout bon jeu de combat qui se respecte, l’on aurait eu droit à l’éternelle palette de coups permettant divers combos à enchaîner pour frapper l’adversaire. Mais ici, il s’agit de judo, et au judo, coller des baffes est interdit. Pas de coups spéciaux magiques non plus : n’espérez pas voir votre judoka lancer un hadoken ou allonger ses membres tel Dhalsim pour frapper son adversaire à distance : il n’en est rien. De ce fait, on pouvait se demander comme le gameplay allait s’organiser pour mettre en scène un sport qui ne se pratique que par des combats au corps-à-corps, sans donner de coups, mais en tentant de déstabiliser l’adversaire par l’intermédiaire de différentes prises visant à le faire chuter, voir à l’immobiliser au sol (étranglements par exemple). 10tacle Studios a eu la bonne idée de s’inspirer des jeux de danse, où l’objectif est d’appuyer sur les touches correspondantes en synchronisation avec leur apparition à l’écran. Un système perturbant les premières secondes, mais un didacticiel impeccable permet de vite prendre en main votre judoka. De plus, vous apprenez les bases avec David Douillet himself comme coach : avouez que ce n’est pas donné à tout le monde. Clair dans ses explications, le champion français évoque point par point le gameplay, avec à chaque fois une mise en situation pour une compréhension optimale. Le gameplay est basé sur plusieurs points. Premièrement, l’aspect technique, avec les différentes prises à réaliser. Celles-ci correspondent à des enchaînements de touches, tels des pas de danse sur Dance Dance Revolution, la musique en moins. Votre judoka et son adversaire disposent de trois lignes de techniques qui apparaissent à l’écran. Il y a toujours quelque chose à faire, même lorsque l’adversaire attaque. Toutes les techniques sont réalisables, et toutes les attaques adverses peuvent être contrées, si toutefois vous appuyez avec un bon timing sur les commandes indiquées. Chaque ligne de commande correspond à ce que j’appellerai une « ligne d’action ». Par exemple, vous débutez votre enchaînement en poussant l’adversaire de face, comme indiqué à l’écran : vont alors défiler à l’écran 3 lignes de techniques, correspondant à vos possibilités d’action lorsque vous poussez votre adversaire de la sorte. Appuyer de façon synchronisée sur une des touches correspondantes permettra de débuter la prise choisie, avec d’autres touches qui font leur apparition, jusqu’à l’aboutissement de la technique. Celles-ci peuvent être assez longues si l’adversaire est un fin contreur, mais peuvent également se révéler extrêmement rapides dans certains cas. Ce système de jeu peut à première vue paraître compliqué, mais après deux-trois combats, les techniques s’enchaînent sans trop de soucis. La base du gameplay est réellement la synchronisation avec l’apparition des commandes à l’écran. Appuyez trop vite et vous prenez le risque de vous faire contrer, appuyez trop tard et votre prise n’aboutira pas, faute de justesse dans vos gestes. A chaque mouvement effectué correspond une ou plusieurs techniques, et c’est là le principal intérêt du jeu : pas de temps de répit ! Toute la sobriété du judo Si le gameplay de ce David Douillet Judo est fort sympathique, on ne peut pas en dire de même de la réalisation, ou tout du moins du contenu. Seul point vraiment réjouissant : la modélisation et l’animation des judokas. Très réalistes, les combattants enchaînent les techniques sans accros, sans bugs, et bénéficient d’une modélisation convaincante. Bon, il y a tout de même quelques chutes assez curieuses lors des combats, où l’un des combattants subit une prise tel un pantin sans vie, pour finalement s’écraser au sol droit comme un piquet. Ce genre de réaction reste toutefois rare. Par contre, on déplorera la pauvreté des environnements. Le judo n’est peut-être pas le kung-fu ou le viet vo dao, mais un peu plus d’artifices auraient été accueillies avec bonheur. Ici, on se retrouve avec des dojos sans grande vie, des supporters criant sans cesse la même chose (ils doivent venir en famille à chaque compétition, je pense). Bref, une ambiance peu adaptée, des aficionados qui ne réagissent pas vraiment à ce qui se passe dans le combat, et une certaine tristesse environnante assez dommageable, tant quelques petits efforts sur ce point auraient sans doute pu être faits. Graphiquement, ce n’est pas l’extase non plus, même si cela reste propre, mais pas de quoi rester scotché devant l’écran. Evidemment, le judo n’est pas le football ou le basket, sports où le show est présent à tout moment, mais quelques petits ajouts ou améliorations auraient pu donner un côté plus attrayant au jeu. Gageons que cela sera présent pour David Douillet Judo 2. David est Grand, mais le contenu est juste Au niveau des modes de jeu, rien de très surprenant. Après un mode entraînement vous permettant de refaire à loisir le didacticiel, de vous entraîner à l’exécution de techniques précises, ou bien combattre librement contre un adversaire, vous vous lancez dans le mode carrière. Celui-ci est composé de différents tournois accessibles selon votre rang, appelé ici « dan ». Il en existe 8, et bien sûr vous débutez en bas de l’échelle avec votre premier dan, les autres tournois étant débloqués au fur et à mesure de vos progrès. Les premiers tournois se déroulent au niveau départemental, puis régional, puis national, pour finir au niveau international lors de l’obtention de votre sixième dan. Après la création de votre avatar, qui n’est en fait que l’un des combattants disponibles que vus avez renommé, c’est parti pour les grands tournois ! Pour chacun d’entre eux, il y a quatre « rounds » : un match de qualification, le quart de finale, la demi-finale et enfin la finale. Chaque match vous fait « consommer » une part de votre jauge d’endurance, alors attention à ne pas trop tenter pour se retrouver à plat pour la finale. Une fois le combat gagné, vous remportez un certain nombre de points d’expérience selon votre prestation, comprenant par exemple des bonus pour les victoires par Ippon (le « but en or » du judo) ou des malus pour chaque pénalité récoltée (les « shidos », distribués par le juge si vous ne saluez pas votre adversaire, si vous refusez de combattre, ou si vous êtes mis hors de la zone de combat par votre adversaire). Ces points d’expérience accumulés vont pouvoir être dépensés pour améliorer les performances de votre judoka : accroître sa vitesse, sa stabilité, sa force, son endurance, ou même perfectionner ses différentes techniques de combat, afin de renforcer son judo pour les tournois de rang supérieur. Les dans s’obtiennent assez vite (deux ou trois heures suffisent pour obtenir votre huitième dan avec un peu de maîtrise), donc ce mode s’avère assez court. Il y a bien trois combats contre David Douillet à débloquer, mais ceux-ci ne sont jouables qu’une seul fois. Si défaite il y a, tant pis pour vous ! Peu de tournois permettent d’être débloqués, et de toute façon, chose assez énervante, vous combattez toujours contre les même judokas, seulement 7 au total, et pratiquement toujours au même endroit (3-4 dojos à tout casser dans ce mode de jeu,), ceci donnant parfois lieu à des énormités (tournoi départemental avec des protagonistes chinois, russes, américains, canadiens, japonais…). Bref, les tournois se suivent et se ressemblent, sans coup d’éclat lors de vos victoires. Dommage. Autre modes de jeux, la classique partie rapide permettant de combattre contre un adversaire selon vos règles (limitées au nombre de rounds, au temps de jeu, à la vitesse et à la présence ou non d’une aide visuelle), ainsi que le mode championnat, mode où vous affrontez vos adversaires à la manière du mode carrière, mais lors d’un seul tournoi. Un mode deux joueurs est également présent pour les championnats et/ou parties rapides. Evidemment, l’intérêt du jeu s’en ressent fortement, l’exécution des techniques devient moins machinale, et c’est avec pas mal de plaisir que l’on enchaîne les combats avec toutes ces petites remarques de mauvaise foi « j’ai appuyé au bon moment pourtant, c’est ta manette qui fonctionne pas », afin de justifier de lamentables défaites. L’encyclopédie du judo volume 1 Une mine d’information, voilà ce que l’on pourrait dire de David Douillet Judo, en dehors de son statut de premier jeu de judo. En effet, fervent amateur d’arts martiaux, mais inculte du judo, je me suis mis à jour de façon franchement complète sur ce sport populaire mais bizarrement méconnu. Sans doute est-ce dû à la réglementation créée par nos amis nippons (l’inventeur du judo est japonais messieurs-dames, et se nomme Jigoro Kano), et donc des termes utilisés et l’appellation des techniques de combat, tout cela exclusivement en japonais. Mais grâce à ce soft, les termes Waza-Ari, Rei, Shido, Ippon, Uchi Mata et des dizaines d’autres n’auront plus de secrets pour vous. De même, l’animation des techniques est assez bluffante au niveau de leur réalisme. Présentes en nombres, ces différentes prises s’exécutent aisément pour un résultat sympathique (projeter son adversaire au sol, de manière assez violente qui plus est se révèle fort agréable, même si faire mal n’est pas le but du judo, au contraire). Une option de jeu permet de supprimer l’aide visuelle, et de ne plus bénéficier du défilement des commandes à exécuter à l’écran. Pas besoin de vous expliquer qu’une connaissance pointue des différentes techniques et de la combinaison adéquate est indispensable pour pouvoir effectuer les prises. Difficile, mais réalisme au top ! C’était un défi corsé pour 10Tacle que d’adapter en jeu vidéo un sport basé non pas sur des coups mais sur des prises visant à prendre l’adversaire au dépourvu, ceci sans asséner de coups. Et c’est avec brio que le gameplay a été élaboré autour d’un système de jeu faisant appel à la précision et au sens du rythme pour enchaîner les prises de la meilleure façon possible. Malheureusement, le contenu du jeu est assez faiblard, et seul le mode deux joueurs, basique, permettra d’accroître, un temps soit peu la durée de vie du soft. Un premier galop d’essai correct, avec pourquoi pas une suite qui permettra la correction des principaux défauts. |
Verdict |
+ Les plus- Les moins-Simulation pointue mais accessible -Animation et modélisation des judokas -Encyclopédie du judo -Les conseils de David Douillet -Très rythmé-Peu de dojos -Peu de judokas -Peu de variété des tournois -Peu de bonus à débloquer -Durée de vie assez faible -Ambiance sonore peu reluisante |
Le mot de la fin
Oui, David Douillet Judo est un bon hommage à ce sport, qui regroupe 600000 licenciés rien qu’en France, et est une institution dans des pays tels que le Japon. Très rythmé, faisant appel à nos réflexes, le gameplay basé sur la précision des enchaînements est frot sympathique. Malheureusement, une réalisation inégale et une trop faible durée de vie empêchent le titre de figurer comme un hit de la console. Plus de contenu, de vie et de dynamisme autour du tatami pourraient être les ingrédients d’un possible second opus. Rei !